vendredi 29 août 2014

1907 – Rappaport au rapport !

1907 – Rappaport au rapport !



Canzone française – Rappaport au rapport ! – Marco Valdo M.I. – 2013
Histoires d'Allemagne 08
An de Grass 07

Au travers du kaléidoscope de Günter Grass : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.

La Charmeuse de Serpents - Henri Julien Rousseau - 1907
ou
L'invention de la musique


Comme tu le constateras, Lucien l'âne mon ami, j'ai conservé ci-après notre conversation telle qu'elle se présenta le jour où j'ai achevé cette Histoire d'Allemagne... C'était il y a un an, déjà. Donc, je disais alors :
Mon cher ami Lucien l'âne, tu me vois tout réjoui... Car, imagine-toi que je te présente aujourd'hui la cent et unième de mes Histoires d'Allemagne et comme je te l'ai peut-être déjà dit, il y en aura en tout cent et deux. Autant dire que je vais bientôt terminer la série que j'avais commencée il y a trois ans. Et bien évidemment, ce n'est pas vraiment fini, car il me faudra maintenant revoir l'ensemble et l'ordonner de façon cohérente et le présenter dans le bon sens ; ce qui prendra encore des mois.


Mon cher ami Marco Valdo M.I., je suis bien content pour toi que tu arrives ainsi à la fin de cette geste assez contemporaine. Je suis très content et en même temps, je me demande ce que tu vas bien pouvoir faire ensuite.


Oh, Lucien l'âne mon ami, je suis dans les mêmes dispositions d'esprit et j'appréhende assez cette sensation de vide soudain qui s'annonce au terme d'une pareille série. Mais je l'ai déjà connu ce moment d'incertitude et j'imagine que comme les autres fois, la solution viendra d'elle-même... sans que je sache trop d'où.


Cela dit, si tu me parlais de la canzone, de cette avant-dernière histoire d'Allemagne, car je ne sais toujours pas de quoi elle cause, ni même qui cause...


Ah, je vois que tu as bien perçu le mécanisme de ces histoires d'Allemagne, qui chacune est présentée par un témoin, un narrateur, lequel est parfois Günter Grass lui-même et la plupart du temps, un narrateur différent dont il nous faut en quelque sorte deviner ou découvrir l'identité. Parfois, comme ici, ainsi que tu vas pouvoir t'en rendre compte, ce narrateur est un parfait inconnu et le reste. En fait, malgré mes recherches, tout ce que je peux t'en dire est – primo – qu'il se nomme Rappaport et – deuzio – qu'il était employé de la D.G.G. ; en clair, de la Deutsche Grammophon Gesellschaft et qu'il devait y occuper le poste de responsable commercial, poste assez stratégique dans une société dont le but était de développer un commerce de « gramophones » et de disques. Et comme on l'a su depuis, une entreprise aux ambitions mondiales. Enfin, cette histoire de Rappaport raconte le passage d'une société où la musique, l'opéra et même, la chanson étaient des événements éphémères, à une société où le son enregistré a submergé jusqu'aux derniers replis la vie quotidienne de (quasiment) tout un chacun. Sans son enregistré – en gros sans le disque, par exemple – pas de radio, pas de cinéma, pas de télévision... Et enseignement majeur de cette histoire, c'est que sans les efforts de Rappaport (ou de tout autre personnage du même acabit)... je n'arrive pas à imaginer ce que serait actuellement le monde.


Sûr qu'il n'y aurait même pas les Chansons contre la Guerre (C.C.G.), s'esclaffe Lucien l'âne.


En effet. Deux mots encore à propos d’Émile Berliner et de ses ambitieuses entreprises... Je signale que si la DGG est son œuvre, il faut savoir qu'il est aussi le fondateur de HMV – « His Master's Voice » (La Voix de son Maître), si célèbre également grâce à son chien Nipper écoutant le gramophone, portraituré par le peintre Francis Barraud, un tableau de 1898. Pour en revenir à « Rappaport au rapport ! », une de ses missions principales fut de constituer le catalogue ; certes, il y avait le disque et le gramophone, mais à quoi pouvait-il bien servir, de quoi allait-on nourrir ce nouvel ogre musical et sonore; alors il fallut tout inventer et en quelque sorte, imposer au public et dès lors, sa mission fut aussi d'aller à la pêche aux artistes chantants. Il le fit avec un grand succès ; à titre d'exemples, dans la chanson, il cite : Melba : Nellie Melba [http://www.youtube.com/watch?v=VGd7c4McSUc], une femme à voix ; Fédor Chaliapine [https://www.youtube.com/watch?v=b3nOBw2UlkI], un homme à voix de basse ; Enrico Caruso [https://www.youtube.com/watch?v=t936rzOt3Zc], un autre chanteur à voix, un ténor, cette fois ; et plus rare encore, Alessandro Moreschi, l'Angelo di Roma [https://www.youtube.com/watch?v=KLjvfqnD0ws], sans doute le dernier des castrats et le seul « enregistré »... Depuis nous avons les hautes-contre, mais ce n'est pas pareil.


Ah, la voix humaine... C'est vrai qu'elle séduit...


Ainsi, je vois que « Rappaport au rapport ! » et sa petite Histoire d'Allemagne t'ont intéressé...


Certes et il est en effet heureux que malgré tout, malgré les sordides histoires d’argent, d'intérêt, de bénéfices... qu'on peut deviner derrière ces belles inventions de l’humaine nation, envers et contre les financiers âpres et coureurs de richesses, les Berliners ensemble (Émile et Joseph) avec l'aide de « Rappaport au rapport ! » ont donné cette nouvelle dimension au monde ; ont pu contrer (au moins partiellement) l'éphémère, qui était la destinée éternelle de la voix, de la musique et du son. Cela dit, retournons à notre tâche qui est de tisser le linceul de ce monde plein de bruit et de fureur et insignifiant, argenté, embanqué et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



« Rappaport, au rapport ! »
Inventer l'industrie musicale,
Une aventure grandiose et pas banale
« Rappaport, au rapport ! »

C'était l'année du premier camp
Où vingt garçons dans le vent
Sur Brownsea Island, en Angleterre
Apprenaient la paix d'un ancien militaire

Moi, je m'appelle Rappaport
Eux, mes patrons, les deux Berliner
Émile et Joseph s'y connaissaient en affaires
Ils disaient : « Rappaport, au rapport ! »

Depuis vingt ans, ils faisaient des disques
Et les gramophones pour les écouter ces disques
Au début, Émile lui-même racontait et chantait
Et il n'y a pas à dire, ça marchait.

Émile avait d'abord inventé le microphone
Ensuite, il inventa le disque et le gramophone.
Faut dire qu'Émile l'aîné des Berliners
A imaginé et développé toute l'affaire.

On a commencé la musique un peu plus tard
C'était un peu monotone toutes ces fanfares
Vite, on en a sorti des millions de ces galettes noires
De l'atelier de la Celler Chaussée à Hanovre

Mais voilà, soudain, le berceau de la D.G.G a brûlé
Malgré tout, on s'en est bien tiré
Et puis, je le disais déjà à la ronde,
Avec le gramophone et le disque, on réinventait le monde

Les Berliners ensemble ont dit : « Rappaport, au rapport ! »
Il nous faut des chanteuses, des basses, des ténors
J'ai enlevé de haute lutte la « grande » Melba.
Une charmeuse de serpents, cette femme-là

Et les hommes ? « Rappaport, au rapport ! »
Fédor la basse, Enrico le ténor
Et Sandro, le dernier castrat
Tels furent mes plus beaux exploits.

« Rappaport, au rapport ! »
Inventer l'industrie musicale,
Une aventure grandiose et pas banale

« Rappaport, au rapport ! »

vendredi 15 août 2014

1908 - Une tradition familiale

1908 - Une tradition familiale


Canzone française – Une tradition familiale – 1908 – Marco Valdo M.I. – 2011
Histoires d'Allemagne 9

An de Grass : 8

Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.


Wilhelm Martin Philipp Christian Ludwig Liebknecht



Pas facile ces histoires d'Allemagne, on dirait, dit Lucien l'âne en regardant Marco Valdo M.I. avec une grande tendresse.


En effet, il y a là beaucoup d'attention, beaucoup de choses à découvrir, c'est un monde inconnu – ou en tous cas, peu connu de moi – que je découvre. Je me demandais à quoi rimait tout ce nouveau cycle, tout ce nouveau Giro dans le siècle passé. Que pouvait bien signifier cette introspection poétique et d'une certaine manière frénétique de notre passé simple et pourquoi avoir ainsi choisi, délibérément choisi le kaléidoscope du père Grass et dès lors, d'être en train de passer aux rayons les viscères germaniques ? Une des réponses pourrait être que le mouvement parti de Prusse, qui créa les Reichs – unifiant au passage des gens aussi différents que les-dits Prussiens et les Bavarois, sans compter les gens des vallées de Moselle et du Rhin ou des sources du Danube, avec tous ses allers-retours, ses soubresauts, ses errements monstrueux, ce mouvement séculaire serait peut-être bien celui qui se continue aujourd'hui dans l'Europe. C'est sans doute de cela qu'il est question. En somme, l'histoire ou les anecdotes d'une parturition... Ce qui est assez semblable au texte fondateur que sont les Vie et opinions de Tristram Shandy, gentilhomme ( The Life and Opinions of Tristram Shandy, Gentleman) de Laurence Sterne , dont tu sais tout ce que nous lui devons, le dit-Sterne étant lui-même un de nos ancêtres.


Mais enfin, Marco Valdo M.I. mon ami, ce ne sont après tout que des canzones qu'on te demande... Et te voilà parti aux sources du Danube et de l'Europe. Parle-moi plutôt de la canzone du jour et oublie un instant tes divagations...


Bon alors afin que tu t'y retrouves facilement, je vais te donner le topo : l’histoire d'Allemagne du jour est racontée par un homme, né à la fin du 19ième siècle – sans doute vers 1898 et évoque deux trajectoires familiales en quelque sorte parallèles. Celle d'une famille ouvrière, la sienne et celle d'une famille d'hommes politiques pacifistes et communistes – les Liebknecht. C'est au cours des meetings tenus par les Liebknecht des deux générations que les destins des deux familles s’entrecroiseront. On y découvre le personnage de Karl Liebknecht qui fut un des seuls députés allemands à s'opposer à la guerre... Toute une histoire. Toute une histoire où les vies des personnages se croisent en permanence et se racontent l'une l’autre et en arrière-plan, on devine la montée des périls, la venue des grands massacres guerriers. On verra aussi le jeune garçon pisser sur le dos de son père... Mais aussi, on comprend qu'il se retrouvera dans les boues de l'Artois vers 1915, où il s'écriera en lui-même – comme tant d'autres : Liebknecht avait raison.


Oui, c'est certain Liebknecht avait raison... De crier partout « Non à la guerre ! » C'est bien ce pourquoi il fut purement et simplement assassiné d'une balle dans la tête, après toutefois avoir été soigneusement torturé de même que sa camarade Rosa Luxembourg par les corps francs socialistes et nationalistes... Cette conjonction de nationalisme et de socialisme me paraît des plus inquiétantes. Il me semble que cela présage un destin effroyable...


C'est le mot... On y va tout droit à la catastrophe. Mais comme tu le sens bien, nous sommes en plein dans le vortex de formation d'une de ces tornades de la Guerre de Cent Mille ans que les riches font aux pauvres pour renforcer leurs pouvoirs, leurs dominations, pour mieux accroître encore et toujours leurs richesses... Comprendre cela hier, c'est aussi pouvoir le comprendre aujourd'hui... Tel est aussi le sens de ce gyroscope poétique.


En somme, écrire ces canzones, c'est une manière, la tienne, de tisser le linceul de ce vieux monde full of sound and fury, signifying nothing et parfaitement cacochyme.

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane


Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht
Non, non et non à la guerre !
Oui, il avait parfaitement raison
Karl, qu'ils assassinèrent
Avec Rosa, un peu après la guerre.


Une tradition familiale : le fils prolonge le père
C'était comme ça chez nous au moins depuis grand-père
Et pareillement, chez les Liebknecht
D'abord, il y eut Wilhelm Liebknecht
Wilhelm Martin Philipp Christian Ludwig Liebknecht
Un rude gaillard celui-là, un ami de Marx, à Londres, en Angleterre
Il avait fondé le parti social-démocrate, le vieux Liebknecht
Et la Deuxième Internationale ouvrière
Et puis, il alla en prison à force d'être toujours contre la guerre
Il n’aimait pas Bismarck et le Chancelier ne l'aimait guère
Ouvrier aux chemins de fer et syndiqué, mon grand-père,
Emmenait aux meetings de Wilhelm, son fils, mon père,
Lequel, pareillement cheminot et socialiste, en avait gardé cette sentence
« L'annexion de l'Alsace -Lorraine apportera la guerre ! »
De là, à penser qu'il eût mieux valu la laisser à la France...
Dès neuf ans, je vis Karl à la brasserie Felsenkeller
Karl Liebknecht évidemment, le fils de Wilhelm, son père
Parler de la grève générale, discourir contre la guerre.
Gamin, je l'ai toujours vu le camarade, en l'air
De haut, perché sur les épaules de mon père.
En 1907, je lui ai pissé dessus à mon père
Au meeting de Liebknecht, je m'en souviens comme si c'était hier
De la raclée aussi qu'il m'a foutue, ce soir-là, mon père.
Pacifiste d'accord, mais très en colère.
C'est dans la tranchée d'Arras que j'ai compris qu'il avait raison
De crier dans les assemblées et au Reichstag : Non !
Non, non et non à la guerre !
Oui, il avait parfaitement raison
Karl, qu'ils assassinèrent

Avec Rosa, un peu après la guerre.

1909 - Un, deux, trois, quatre, cinq, six jours

1909 - Un, deux, trois, quatre, cinq, six jours



Canzone française – Un, deux, trois, quatre, cinq, six jours – Marco Valdo M.I. – 2013
Histoires d'Allemagne 10
An de Grass 09

Au travers du kaléidoscope de Günter Grass : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.




Walter Rütt  en 1909 




Et voici, pure coïncidence, que se termine en même temps que l'année, le cycle – c'est le cas de le dire – des Histoires d'Allemagne. Il aura fallu trois ans pour y arriver. Comme tu le vois, ce n'est pas une mince affaire, c'est carrément une course de fond, un peu comme l’histoire que raconte le narrateur inconnu, dont on ne sait jamais trop bien qui il est, ni quand il parle, ni d'où il parle. Cette fois, on sait cependant qu'il s'agit d'un gars qui habituellement travaille dans un hôpital berlinois ; sans doute, un infirmier ou un préparateur et qui assiste un médecin – sans doute du même hôpital – au service médical des Six Jours de Berlin en 1909. Il déclare qu'il pense avoir été choisi plus pour ses compétences cyclistes supposées – il vient au travail à vélo et se passionne plus pour la petite reine que pour ses capacités en matière médicale.


Moi, dit Lucien l'âne, vois-tu Marco Valdo M.I. mon ami, comme âne, et même si on me considère parfois comme l'ancêtre du vélo et que les Chinois, dit-on, désignent le vélo sous le nom assez explicite d' « âne que l'on tient par les oreilles et que l'on bourre de coups de pied pour qu'il avance », je ne peux faire du vélo. À la rigueur, de mes quatre pattes, je pourrais faire du tandem. Cependant, une chose est sûre (chose sûre cycliste...), je n'ai jamais été admis dans une course cycliste et pourtant, en quelque sorte par proximité de destin, je m'intéresse au vélo. Du reste, tu le sais, pour moi comme pour Térence, rien de ce qui est humain ne me demeure étranger. Il disait en latin : « humani nihil a me alienum puto ». J'attends donc avec le plus grand intérêt la suite de ton histoire.


Ainsi, je disais que le narrateur inconnu assiste en tant qu'assistant du Docteur Willner aux premiers Six Jours de Berlin en 1909. Mais sais-tu ce que sont les Six jours ?


Je pense bien, dit Lucien l'âne en redressant les oreilles subitement et verticalement. Je pense bien que je le sais... Enfin, je crois. Les Six jours sont en fait une course cycliste qui dure six jours d'affilée, nuit et jour, dans un lieu clos – généralement, un vélodrome. C'est donc une course sur une piste d'environ 400 m sur laquelle comme les danseurs d'On achève bien les chevaux [http://www.youtube.com/watch?v=nMoGmOCaI3s], les coureurs tournent, tournent jusqu'à la nausée. Il y en a qui tombent, d'autres sont malades... Bref, un service médical s'impose.


C'est bien cela. On a d'ailleurs imposé une limite de douze heures par jour par personne... D'où les équipes de deux et parfois, trois coureurs. Mais ces Six jours de Berlin sont un peu particuliers et les détails méritent d'être contés. D'abord, ce sont les premiers organisés sur le continent européen et particularité plus étrange ou saugrenue, comme tu voudras, c'est qu'ils se déroulèrent dans un jardin zoologique.


Ha, ha, dit Lucien l'âne en ricanant, le symbole est excellent... Dans un parc zoologique... Des hommes qui tournent comme des ânes, c'est un juste retour de la manivelle ou de la pédale, c'est selon... car rappelle-toi, nous les ânes, du moins, certains d'entre nous, on nous fait tourner sempiternellement pour pousser la noria ou le moulin à grains.


Il y a de ça, d'ailleurs, dit Marco Valdo M.I. On fait se combattre ces nouveaux gladiateurs, ces nouveaux esclaves pour les mêmes raisons que celles qui présidèrent à Rome à ce qu'on nommait « Panem et circenses ». Et comme à Rome, sous les yeux de l'Empereur – représenté ici dans la loge impériale par son fils, le Kronprinz Oskar. Cependant, je n'en ai pas encore terminé avec les particularités de ces Six Jours de Berlin. Figure-toi qu'un des organisateurs, mais aussi un des meilleurs coureurs de Six jours de l'époque, Walter Rütt – il avait gagné notamment les Six Jours de New-York en 1907 et en 1909 et menait une carrière de cycliste professionnel entre l'Australie et les USA, n'a pas pu concourir alors même qu'il était Allemand.


C'est surprenant ; à t'entendre, c'était la meilleure chance pour qu'un Allemand remporte ces premiers Six Jours de Berlin... et en plus, tu dis qu'il était un des organisateurs...


Certes et sans doute même, est-il le concepteur de ces Six Jours à Berlin, ville où il mourra cinquante-cinq ans plus tard. Bref, il ne pourra pas les courir ces fameux Six Jours et justement car il était Allemand... Allemand et exilé, il était considéré par la toute puissante armée prussienne, comme un déserteur. C'est ainsi que la paire étazunienne James Henri 'Jim' Moran et Floyd McFarland l'emporta.


Un déserteur ?


Oui, un déserteur, mais pas à la manière de celui de Boris Vian [[http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=1&lang=it]]... Walter Rütt était plutôt un déserteur administratif... D'ailleurs, lors de la Guerre de 1914, alors qu'il vivait à Newark dans le New Jersey..., il rentra dès octobre en Allemagne et participa activement à la guerre, comme le révèle un article du journal étazunien The Day du 4 octobre 1914 intitulé "Cyclist Walter Rutt Fighting For Kaiser ".


Pour finir, laisse-moi te dire combien j'aime ta façon de rappeler les comptines enfantines à ta rescousse et de les faire danser ironie et légèreté pour donner un air de chansonnette à tes histoires... Cela dit, reprenons notre tâche et tissons le linceul de cette société où les sports comme tout le reste ne sont qu'affaires, argent, arrangements divers où finalement s'installe la gangrène et où ils ne sont que miroirs aux alouettes et servent à masquer d'autres ambitions impériales, impérialistes, conquérantes, militaires, commerciales de ce vieux monde cacochyme.


Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



C'était l'année de la mort
De Géronimo et de la Mogador
À Berlin, au Vélodrome d'Hiver
J'assistais le Docteur Willner
Pour les Six jours, invention américaine
Par équipes de deux durant une semaine
Une première chez nous, cette course dans un zoo
Cet immense marathon à vélo.
Pour voir ça, ils venaient de partout
Pour voir ça, il y avait un monde fou

Un, deux, trois, quatre, cinq, six jours
On fait des tours, on fait des tours
Un, deux, trois, quatre, cinq, six , sept
On fait des tours à bicyclette
Ainsi font, font, font
Les joyeux coureurs de fond
Ainsi font, font, font
Dix mille tours et puis s'en vont

À New-York, Rütt deux fois avait gagné
C'était le meilleur, sans discuter
C'est sûr... Rütt devait gagner, sauf erreur
En duo avec Johnny Stol le Hollandais
S'il était venu, c'est sûr, Walter l'emportait
Mais, les militaires n'aiment pas les déserteurs,
On est à Berlin, faudrait pas oublier qui commande
Un déserteur ne peut pas porter les couleurs allemandes
Les généraux n'ont pas voulu de ce déshonneur
Ils ont interdit Walter, le déserteur

Un, deux, trois, quatre, cinq, six jours
On fait des tours, on fait des tours
Un, deux, trois, quatre, cinq, six , sept
On fait des tours à bicyclette
Ainsi font, font, font
Les joyeux coureurs de fond
Ainsi font, font, font
Dix mille tours et puis s'en vont

Au son des marches militaires à répétition
Des fanfares et des flonflons
Sur la piste peinte en vert, les concurrents suaient
Dans la galerie, les jeunes gens se bousculaient
Dans les tribunes, les messieurs paradaient
Dans les loges, les dames en chapeaux minaudaient
De sa loge, Sa Majesté Impériale
A dû , quel scandale !
Aux Six jours de Berlin,
Saluer le triomphe des Américains

Un, deux, trois, quatre, cinq, six jours
On fait des tours, on fait des tours
Un, deux, trois, quatre, cinq, six , sept
On fait des tours à bicyclette
Ainsi font, font, font
Les joyeux coureurs de fond
Ainsi font, font, font
Dix mille tours et puis s'en vont

L’année d'après, en cycliste souverain
Aux mêmes Six jours de Berlin,
Rütt, avec Stol le Hollandais
Une première fois l'emportait
Et puis une fois en onze, et puis, deux fois en douze
Quand enfin le Reich et ses militaires
Eurent définitivement perdu la guerre
Et que Sa Majesté se fut éclipsée en douce
En mil neuf cent vingt-cinq encore.
Et Walter Rütt entra dans la légende des sports.

Un, deux, trois, quatre, cinq, six jours
On fait des tours, on fait des tours
Un, deux, trois, quatre, cinq, six , sept
On fait des tours à bicyclette
Ainsi font, font, font
Les joyeux coureurs de fond
Ainsi font, font, font

Dix mille tours et puis s'en vont...

mercredi 13 août 2014

1910 - La Grosse Berta

1910 - La Grosse Berta

Canzone française – La Grosse Berta – 1910 – Marco Valdo M.I. – 2011

Histoires d'Allemagne 12

An de Grass : 10

Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.







Comme bien tu penses, Lucien l'âne mon ami, une guerre, ça se prépare. Une guerre militaire, je veux dire, une de celles où on envoie plein de gens se massacrer réciproquement et où on utilise plein d'armements, si possible, les plus puissants, les plus saignants. Bref, où on fait un tas de morts, de blessés, de mutilés. Et si on veut exécuter la chose en grand, on ne saurait y échapper, il faut du temps... Il y faut beaucoup temps, sans compter des masses d'argent, pour s'y préparer en espérant un certain succès. L'armement est certes une affaire de militaires, mais surtout aussi, d'industriels et de capitaux. Tu me diras sans doute qu'il y faut aussi des ouvriers, mais si c'est évident, il n'en reste pas moins que ceux-là ne sont que des rouages de l'immense machine. Comme nous suivons ici ces histoires d'Allemagne, ces anecdotes quelque peu éclairantes sorties tout droit du kaléidoscope de Monsieur Grass, il te souviendra qu'on a déjà vu un peu ce qu'il en était de la marine et de la sous-marine impériales. Ici, c'est l'histoire d'une des armes les plus célèbres de l'armée allemande, dont la canzone va nous entretenir. Oh, rassure-toi, il n'est nullement question d'en faire l'apologie, ni même de traiter l'affaire à la manière militaire... L'approche est bien plus civile... comme tu le verras. Et ne manque pas d'un certain recul...


J'aime autant, dit Lucien l'âne en secouant son postérieur pour souligner son propos. Et puis, je ne te vois pas chanter les louanges de la puissance militaire. Cependant, je suis curieux de voir l'angle d'attaque, si j'ose ainsi dire, de ton histoire.


Si tu oses dire... Tu ne crois pas si bien dire... en parlant d'angle d'attaque et cela pour plusieurs raisons. La première est carrément militaire, car la notion-même d'angle d'attaque renvoie directement au langage et aux conceptions militaires. La seconde est tout aussi guerrière, puisqu'il s'agit ici d'artillerie, discipline où bien évidemment les angles ont leur mot à dire, de même que la trigonométrie, le calcul intégral et toutes sortes de kabbalistiques réflexions balistiques. La troisième et c'est là que je veux en venir, en relevant ton « si j'ose dire », est la croupe magnifique de la dame qui raconte l'histoire. Une dame, une ouvrière, disons la femme d'un ouvrier des aciéries Krupp à Essen... qui est furieuse car les ouvriers de la cité où elle habite se moquent d'elle du fait qu'elle s'appelle Berta et qu'elle a quelques rondeurs. L'angle d'attaque de leurs plaisanteries, si j'ose ainsi m'exprimer, est qu'en secret dans l'usine, ils mettent au point la Dicke Berta – la Grosse Berta, un canon d'envergure exceptionnelle, dont je te passerai les détails techniques


Oui, oui, j'en ai entendu parler. C'était, quand je l'ai vue plus tard, une belle pièce d'artillerie. Une machine de guerre gigantesque et assez pesante, il est vrai. Mais aussi, elle m'a l'air drôle cette dame, cette Berta et bien décidée à ne pas s'en laisser conter par ces messieurs et leurs plaisanteries fines.


En effet, elle est assez sarcastique et très femme du peuple. Moi, je l'aime bien la Berta. Mais elle, elle en veut vraiment beaucoup à ce canon monstrueux auquel on a donné un nom similaire au sien. Elle déteste la monstrueuse chose d'acier, qui faisait quand même quarante-deux tonnes et envoyait des centaines de kilos de mort à chaque tir. Tout ça montre qu'il ne faut jamais laisser les enfants jouer avec des allumettes... Qu'on ne vienne pas dire qu'il n'y a pas eu de préméditation dans le déclenchement de la Grande Guerre, quand on sait tout ce qui se mettait au point en matière d'armement. Nous sommes en 1908, six ans plus tard, peut-être huit – question de mise au point, la bouche à feu de Berta et celles de ses petits copains crachaient la mort à plein poumons. Par ailleurs, je te rappelle qu'on en avait déjà parlé de ces aciéristes Krupp à propos des ouvriers de Turin et de la mort blanche aux usines Thyssen-Krupp... On soulignait déjà ce même mépris de l'humanité.


En somme, dit Lucien l'âne, la canzone du jour raconte une facette de cette Guerre de Cent Mille Ans que les riches font contre les pauvres, où ils se servent des pauvres pour s'enrichir encore et encore, pour accroître leur domination, perpétuer leurs privilèges sans trop se soucier, et pour dire les choses plus clairement encore, en se foutant complètement des dégâts et des morts que leurs délires et leurs caprices occasionnent. Et nous, dans cette Guerre de Cent Mille Ans, nous qui avons clairement choisi notre camp, nous devons avoir l'obstination majeure, cette haute volonté permanente de saper leur arrogance, de tisser le linceul de ce vieux monde avide, assassin et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



Je suis Berta, la grosse Berta
J'ai deux jambes, deux bras
Et tout ce que vous voyez là.

Je suis la Berta de la cité-jardin
Avec Jacob, mon mari, on habite Essen à côté des usines Krupp
Et quand je pends la lessive au jardin,
Les hommes qui passent me font des commentaires sur ma croupe.
Mon Jacob travaille à la fonderie d'acier ;
Là-bas, dit-il, ils fondent des canons.
Une bouche à feu de quarante-deux centimètres; difficile à couler.
Une fabrication secrète, la grande fleur de la nation.
Son nom de code est Grosse Berta : Dicke Berta ;
Ils l'appellent aussi Berta l'Assidue : Fleissige Berta.
Elle doit imposer la grandeur de l'Empire allemand.
Il faut du temps pour la mettre au point, leur Berta ;
Subséquemment, subséquemment,
Subséquemment, tous se foutent de moi
Et sur ma croupe, ils plaisantent tous lourdement.

Je suis Berta, la grosse Berta
J'ai deux jambes, deux bras
Et tout ce que vous voyez là.

Ils disent : « On y arrivera avant que ça pète ! »
Vous imaginez ça, vous voyez ma tête !
Quand ça a pété, ils ont canardé Paris avec leur Grosse Berta.
À cause d'elle, de cette grosse pétasse, les Français riaient de moi.
Je déteste qu'on l'appelle comme moi, cette horreur-là.
Et puis, ce n'était même pas la Berta qui a fait tous ces dégâts.
Mais les Parisener Kanonen – les Canons Parisiens
Qui tiraient comme des fous, dès le matin,
Avec leurs cous de girafe asthmatiques.
Ils s'appelaient : Lange Max et Lange Frédéric.
Ils venaient aussi de chez nous, ces deux idiots
Et puis, avec leurs obus de 400 kilos
Ils ont fait plus de 250 morts et des centaines de blessés.

Je suis Berta, la grosse Berta
J'ai deux jambes, deux bras
Et tout ce que vous voyez là.

Mais moi, même si je suis la grosse Berta de la cité,
Je n'ai jamais tué personne, moi. Je déteste ça.
Jacob, mon mari, qui m'aime tant, est revenu estropié.
Il m'a dit : « Ce qui compte, c'est que tu aies la santé, Berta ! ».
Regardez-moi... J'ai une santé resplendissante.
Vous savez, l'autre Berta a repris du service à la guerre suivante ;
Elle avait juste changé de nom; on l'appelait alors la Grande Gilda.
Mais cette fois, c'est Karl et Gustav qui ont fait le plus de dégâts.

Je suis Berta, la grosse Berta
J'ai deux jambes, deux bras
Et tout ce que vous voyez là.
Je suis la Berta de la cité-jardin
Avec Jacob, mon mari, on habite Essen à côté des usines Krupp
Et quand je pends la lessive au jardin

Les hommes qui passent me font des commentaires sur ma croupe.

lundi 11 août 2014

1911 - Guillaume dessine des bateaux

1911 - Guillaume dessine des bateaux


Canzone française – Guillaume dessine des bateaux – 1911 – Marco Valdo M.I. – 2011
Histoires d'Allemagne 12


An de Grass : 11
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.





Guillaume en Grand-Amiral
Tableau de Adolph Behrens - 1913



Cette fois-ci, Lucien l'âne mon ami, il y a juste un siècle entre l'année qu'évoque – arbitrairement, j'entends bien, mais s'agissant d'un Empereur, il n'y a là rien que de très normal – ma canzone du jour (1911) et l'année en cours (2011). L’Empereur en question, c'est Friedrich Wilhelm Viktor Albert von Hohenzollern (1859-1941). Je te donne son nom entier, car ça fait toujours rire ces noms à rallonges. Bref, Friedrich Wilhelm, etc, était roi de Prusse et Empereur d'Allemagne sous le nom de Wilhelm II ou Guillaume II (1888-1918) ou, ou... C'est sous ce nom de Guillaume, qui était aussi celui de son aïeul, qu'il sera brocardé dans la chanson populaire française : « Guillaume a une gueule de bois, le corps en carton, les jambes en ficelle... », que l'on reproduira plus tard sans grandes modifications pour le pantin du Troisième Reich : « Hitler a une gueule de bois... ».


Mais enfin, Marco Valdo M.I., il n'en pouvait rien s'il était né avec un nom comme ça, dit Lucien l’âne en tressautant un peu.


Je te l'accorde volontiers. En cela, il n'est en rien responsable, mais pour ce qui suivit, il pouvait prendre ses responsabilités; rien ne l'obligeait à accepter ce destin idiot. Mais c'est tout le contraire qu'il a fait... Il s'y est précipité, il l'a assumé et bien au-delà. On trouvera dans la canzone toute l'ironie dans une phrase qui lui est attribuée : « Je veux être un souverain de paix mais puissamment armé », dans une lettre à son ami Eulenbourg, qu'il avait dû éloigner à la suite d'attaques répétées qui visaient l’homosexualité d'Eulenbourg, ce qui – à l'époque – constituait un motif de scandale et même plus; l'homosexualité étant un délit pénalement punissable. On a un peu oublié, par la suite, la volonté de puissance qui l'habitait, ce Guillaume. On est allé chercher dans les écrits caviardés d'un philosophe, la source de la démence qui a ravagé l'Allemagne une deuxième fois. Mais elle est là cette hystérie, cette volonté de puissance, déjà présente dans Guillaume, venue d'on ne sait quelle alchimie prussienne. Guillaume ne s'est absolument pas caché de sa volonté de conquérir le monde, de rivaliser directement avec ses cousins d'Angleterre. Et cela, seule la maîtrise des mers pouvait le lui assurer. D'où cette monomanie dessinatrice, d'où cette curieuse propension à s'atteler sur une selle à poursuivre des rêves d'escadres, chez le souverain d'un peuple qui n'était jusque là pas des plus réputés pour ses ambitions maritimes. On retrouvera cette obsession dans le « Tirpitz », sans doute un des plus grands cuirassés allemands de la guerre suivante. Tirpitz, justement, apparaît dans la canzone... Il fut ministre de la Marine et Grand Amiral de la Marine Impériale, voulue par Guillaume...


Je les vois bien tous les deux, ou tous les trois avec Eulenbourg, déguisés en marins avec des pompons sur la tête s'en aller sur les quais de Kiel en chantant « C'est nous les gars de la Kaiserlichemarine... », dit Lucien l'âne en ployant sur ses jambes antérieures, pris d'un fou-rire.


Tu peux rire, Lucien l'âne mon ami, mais comme tu le vois, canzone après canzone, la grande bacchanale se prépare. Comme pour les sous-marins, comme pour les canons, on s'active... Une flotte pareille ne se fait pas en un jour, un rêve pareil ne se réalise pas en un coup, c'est une affaire de dix, vingt ans... Il y faut une volonté de fer, il y faut de la constance et de l'obstination, de la patience aussi... Se lancer trop tôt dans l'aventure est gage d'échec à coup sûr. Guillaume sait cela, même s'il est impatient, pressé... Il force l'allure, mais les contingences techniques le brident. Il veut la paix, certes... en attendant de passer aux actes héroïques. En attendant d'envoyer, comme il l'a fait à Pékin (voir L'été à Pékin)
[[http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?id=37570&lang=it]], d'envoyer les autres massacrer et se faire massacrer. Parenthèse, tout cela plaît beaucoup à ceux qui lui fournissent ces jolis jouets en acier...

Tout cela est infiniment effrayant et ne présage rien de bon... D'accord, on sait ce qu'il en adviendra, on sait qu'on le racontera bientôt, qu'on ne pourra passer à côté de tout cela, on imagine bien ce que peut signifier une paix « puissamment armée ». Et dans le monde d'aujourd'hui, il y en a encore plein de gens qui croient à une paix puissamment armée... et qui nous chantent cette fredaine. Mais, crois-moi, Marco Valdo M.I. mon ami, cette « paix armée » n'est qu'un prélude à d'autres ébats. La Guerre de Cent Mille Ans ne fait jamais relâche ; tout au plus, elle reprend des forces pour faire pire encore. Alors, tissons le linceul de ce vieux monde pacifiste armé, guerrier et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.





Je suis Guillaume, fils de Frédéric
Empereur d’Allemagne, Roi de Prusse, et cætera
Je suis le petit-fils de la Reine Victoria
Qui règne sur l'Empire britannique
D’ailleurs, elle est morte dans mes bras.
Je veux être un souverain de paix
Mais puissamment armé
Avec une marine de « Hochsee »
Le grand-amiral Tirpitz est garant de la paix


Assis sur ma selle, face à mon secrétaire
Toujours d'attaque, je prends un plaisir d'enfer
À dessiner des navires de guerre
Des cuirassés lourds, des escadres entières
Je veux être un souverain de paix
Puissamment armé
Avec une marine de « Hochsee »
Le grand-amiral Tirpitz est garant de la paix

Vous connaissez mon goût pour la mer,
Pour les croiseurs, les cuirassés, les canonnières
Vous en avez déjà entendu parler
Et mes U-boote, croyez-moi, vont vous étonner.
Je veux être un souverain de paix
Puissamment armé
Avec une marine de « Hochsee »
Le grand-amiral Tirpitz est garant de la paix

Ah, la marine, la marine, y a que ça, pour aller partout
Weltpolitiek ! L'Empire (in der ganzen Welt) dans le monde entier
Une place au soleil (Platz an der Sonne) à gagner
Une Kaiserliche Marine (Marine Impériale), une Hochseeflotte  (Flotte de haute mer), pour être partout
Je veux être un souverain de paix
Puissamment armé
Avec une marine de « Hochsee »
Le grand-amiral Tirpitz est garant de la paix

Sur la Baltique, sur la Mer du Nord, d'abord
Des vaisseaux lourds, Seidlitz, Blücher, de ma main dessinés
À Kiel, à Wilhelmshaven, à Dantzig, dans nos ports
De gros navires de combat, d'énormes cuirassés
Je veux être un souverain de paix
Puissamment armé
Avec une marine de « Hochsee »

Le grand-amiral Tirpitz est garant de la paix